Analyses de l'équipe 2



C’était la guerre des tranchées


                                           Jacques Tardi (1946-)



Jacques Tardi est un auteur-dessinateur français très connu. Il est né le 30 août 1946 à Valence. Il a cependant passé son enfance en Allemagne, dans la partie occupée, où son père était militaire (il s’est battu durant la Deuxième Guerre mondiale). C’est en partie ce qui l’a inspiré à autant en parler dans ses bandes dessinées. Il est ensuite allé étudier aux Beaux-Arts, à Lyon. Puis il est passé aux Arts décoratifs de Paris. Il s’est marié avec la chanteuse et traductrice Dominique Grange, le 18 juin 1983.


Il commence d’abord par travailler pour le journal Pilote, de René Goscinny, en dessinant des petites bandes dessinées. En 1972, il publie sa première longue histoire, Rumeurs sur le Rouergue, toujours dans Pilote.
En 1976, il commence une série à qui il devra une bonne partie de sa célébrité: Les Aventures extraordinaires d’Adèle Blanc-Sec, qu’il poursuivra pendant plusieurs années.
Il continuera ensuite à écrire de nombreux ouvrages. On peut remarquer que la Première Guerre mondiale est un thème qui revient très souvent dans ses œuvres, Tardi s’étant inspiré de ce que lui racontait son grand-père, qui y avait combattu, et qui lui en avait conté toutes les atrocités. Cependant on peut remarquer une évolution par rapport à la manière dont il aborde la guerre. Au début (par exemple, dans Les Aventures extraordinaires d’Adèle Blanc-Sec), la guerre est plutôt en arrière-plan, en fond. Puis peu à peu, elle devient de plus en plus présente. Il a effectivement fini par consacrer ses œuvres à celle-ci, comme dans C’était la guerre des Tranchées, Putain de guerre, etc…
         

                                   



Ces ouvrages l’ont également rendu très célèbres, et on admire le réalisme et la force qui y sont présents. En 1985, il gagne le Grand prix de la ville d’Angoulême, et deux Eisner Awards en 2011.


C’était la guerre des tranchées, de Jacques Tardi
(Résumé critique)

Cette bande dessinée a été écrite par Jacques Tardi en 1993, et parle exclusivement de la Première Guerre mondiale. Elle ne raconte pas un récit continu : elle relate plein de petits évènements, d’anecdotes de soldats français, dans le genre de celles qui auraient pu réellement arriver à l’époque. On parle de plusieurs histoires de soldats différents (les poilus), de leur quotidien, et bien souvent… de leur mort. En voici quelques-unes.
La première histoire est celle de Binet, un soldat de 2ème classe. Un jour, son ami, Faucheux, part en reconnaissance dans un lieu nommé le « no man’s land », un endroit très dangereux, situé entre les tranchées allemande et française, mais il n’en revient pas. On s’inquiète puis on n’y pense plus : il était  sûrement mort. On voit ensuite Binet partir quelques jours dans un village à quelques kilomètres, on y découvre alors l’état d’esprit des citoyens pendant la guerre. Les gens sont maussades, vivent dans la peur, entre les va-et-vient des soldats. Il revient ensuite sur le front, et ne peut s’empêcher de penser à Faucheux : il décide d’aller le chercher sur le « no man’s land ». Malheureusement, il le trouve mort au fond d’un trou et au même moment, se fait repérer par un Allemand; il est abattu à la mitrailleuse, dans le même trou que son ami.
Une autre histoire met en avant Mazure, un soldat expérimenté, seul en forêt. Comme le dit le narrateur, « Mazure n’avait pas vu grand-chose de la bataille »; pour cause, pendant la bataille il se disperse et se retrouve dans une forêt, seul, blessé, face à un soldat allemand qu’il exécute.
La bataille prend fin, plus aucun bruit, la nuit tombe peu à peu. Il prend son courage à deux mains, sort du bois, se dirigeant vers le champ de bataille, le regard vide. Il a peur. Il marche jusqu’à apercevoir un village, puis un cimetière, puis une chapelle. Il entre, la main sur l’abdomen. Il voit une représentation de Jésus crucifié. Cela faisait longtemps qu’il en avait vu une, et la seule vue de cette croix, fait émerger en lui un sentiment d’apaisement. Il aperçoit deux cuirassiers morts, et un pistolet pointé dans sa direction. Devant lui, un Allemand seul, armé. Ils restent ensemble 4 jours, une amitié, une complicité naît au fil du temps. Ils se promettent de rester tous deux sains et saufs, peu importe le camp qui arrivera en premier au village. Les Allemands arrivent les premiers, mais aucun des deux n’ose sortir. Puis c’est au tour des Français de visiter le village en ruine.  Ils inspectent chaque maison de fond en comble. Ils aperçoivent le soldat allemand retranché et le Français. Une balle est immédiatement tirée, venant se loger dans le ventre du compagnon de Mazure. Le Français est par la suite arrêté, jugé à la cour martiale, accusé de haute trahison et de fraternisation avec l’ennemi. Il est exécuté.
La troisième histoire est celle de Bouvreuil, un soldat artiste bricolant la ferraille utilisée lors de la guerre, comme des douilles ou des obus pour les transformer en vases, crucifix ou tire-bouchons. Bouvreuil monnaye tout ce qu’il peut. Ses objets, d’abord, mais aussi des services. Tout cela dans le but d’offrir à Édith, sa femme, une paire de boucles d’oreilles. Un jour, il faut relayer un soldat à un poste de garde à moins  de 50 mètres des tranchées allemandes. Un camarade est désigné mais en échange de 5 francs, Bouvreuil y va à sa place. Cependant, en y allant, il reçoit une balle dans la jambe. Il est dans une atroce souffrance. Pour éviter qu’il agonise trop longtemps, un camarade donne fin à ses jours.
Dans cette œuvre, très réaliste, mise en forme par le célèbre illustrateur français, Jacques Tardi, l’horreur de la guerre est très bien exprimée et parfois d’une manière choquante, glauque. Les dessins, en noir et blanc, montrent très bien le côté sombre qui était celui des tranchées, le manque de couleurs montre la tristesse, l’agonie dont souffraient les soldats. Cependant un rajout de couleurs aurait pu aussi accentuer le coté très morbide de la guerre. Un avis partagé en fonction des goûts divers et variés de chacun. Cette BD, non censurée et sans retenue de l’auteur peut choquer et est faite pour choquer, un souhait de l’auteur certainement. Les dessins expriment la réalité à laquelle faisaient face les soldats. Par la suite, Tardi explique bien la mentalité des soldats, le calvaire que vivaient les combattants jours après jours. Les soldats sont représentés tristes, loin de tout de leurs familles, de leurs amours, de leurs vies.
Tardi, dans ce livre, a très bien représenté l’enfer des tranchées et de la guerre, ce qui nous plonge parfois réellement dans le contexte, avec une vague impression d’y être présent.

Le réalisme dans C’était la guerre des tranchées

Cette bande dessinée de Jacques Tardi est réaliste, mais c’est en fait très intéressant, car elle l’est à certains aspects, pas à d’autres. C’est Tardi lui-même qui en parle dans la préface.

Tardi n’a jamais cherché à représenter chaque détail technique de la guerre. De toute façon, selon lui, les chiffres diffèrent selon les ouvrages. “Mon but n’a pas été de faire un catalogue de l’armement ou des uniformes […], encore moins de tenir une comptabilité: le nombre d’obus au m2, ou le nombre d’hommes engagés dans telle ou telle offensive”, dit-il. De toute façon, c’est un auteur et non un historien; il a bien sûr fait de nombreuses recherches, mais en matière de représenter la guerre en chiffres et en faits historiques exacts, on trouverait meilleur que lui.




Il a plutôt cherché à nous plonger dans la vraie ambiance de la guerre, en s’appuyant sur des récits qu’il avait entendus à un moment ou un autre. Il explique d’ailleurs qu’il a fait ce choix, de ne pas se concentrer sur un personnage une histoire, un héros, car selon lui il n’y a pas de héros à la guerre, seulement un groupe d’hommes qui aimeraient être ailleurs. Il a représenté les personnages avant tout comme des hommes, pas seulement comme des soldats. Tardi cherche à montrer aux lecteurs les émotions à travers les soldats et leur quotidien ; le froid, la fatigue, la crasse, la faim, la peur.


On peut aussi remarquer que ses dessins sont crus, noirs, sombres, sans censure. On voit des gueules cassées, du sang, des blessures, des cadavres, de la pourriture. C’est dans ce sens-là que cette œuvre est très réaliste. On voit réellement ce qu’il se passe sur le front: les batailles, bien sûr, mais aussi les fraternisations entre les différents camps, les nuits dans les tranchées, les “pauses” de quelques jours.


Tardi a bien entendu une vision négative de la guerre (qui en aurait une vision positive?). Mais les récits sont plutôt objectifs, c’est une narration externe, comme si on suivait les soldats avec une caméra. On a accès aux détails, et on ressent sûrement plus l’expérience que si on lisait un article historique.

Narration des pages 21-22-23-24

            Mise en contexte : L’ami de Binet est parti dans le « no man’s land », un endroit extrêmement dangereux situé entre les deux camps. Et il n’en est toujours pas revenu…

Binet décida de partir à la recherche de son camarade Faucheux, non revenu du « no man’s land ».  Au milieu de la nuit, incapable de dormir, il se leva, et proposa au soldat qui était en train de veiller de le remplacer. Lorsque celui-ci repartit se coucher, Binet partit en courant vers le no man’s land…

            Il avança rapidement vers le trou d’obus, l’endroit où les soldats se cachaient souvent, et où il y avait quelquefois des fraternisations entre soldats. Il commença à penser que son ami y avait peut-être monté un commerce, et que son capitaine était aussi dans le coup… Puis il  se demanda s’il était mort. Il se posait mille questions… Il devenait fou.
           
            Après quelques minutes, il aperçut quelque chose. Un cadavre se décomposant, presque. Faucheux. Mort au fond du trou! Il cria, il l’appela, hurla en choc. Puis soudain, des coups de feu. Il venait de se faire repérer par un ennemi, caché plus loin, dans les ruines. Binet reçut les balles en plein dans le ventre, et ressentit aussitôt une souffrance indescriptible. Il sentait que c’était la fin pour lui. Il tomba à genoux, se vidant de son sang, avait mal, avait froid. Il vit toute sa vie défiler devant lui. Il revit sa maison, sa famille, ses voisins… tout. Il ne verrait pas le lever du jour.



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